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Se livrer
Voilà déjà quelques mois que ma bibliothèque personnelle, livre après livre, rejoint virtuellement Babelio. Et, très curieusement, j'en suis troublée, quelque peu perturbée.MES livres, ce sont mes compagnons de toujours, ils ont accompagné chaque étape de ma vie, ils parlent de moi, ils parlent pour moi et me dévoilent, bien plus que mon profil Facebook ou mes blogs. Ils en disent long sur mes amours, mes amis, mes apprentissages, les moments difficiles, les égarements et chemins de traverse, toutes les strates de toutes ces années. Mon premier Pléiade (le tome 1 de A la recherche du temps perdu) offert il y a si longtemps par un homme que j'aimais. Mon premier livre en version originale (The Unicorn d'Iris Murdoch), qui m'a demandé des centaines d'heures de travail avant de me donner du plaisir. Soleil noir de Julia Kristeva et Mars de Fritz Zorn, qui m'ont aidée à comprendre et vivre un passage dépressif. Les catalogues d'expositions qui me renvoient à des amitiés parfois perdues (quand ? avec qui ? à quelle occasion ? en quelle saison ?). Les livres de grammaire et de linguistique. Les livres sur la grammaire et la linguistique. Les dictionnaires. Les livres sur le livre et les bibliothèques. Les albums de La Pléiade (ah, Prévert !). Les livres sur les systèmes d'écriture. Les philosophiques et les poétiques. Les curiosités (Le déshonneur des poètes de Benjamin Péret transcrit en "alphabet de la guerilla" par Jacques Villeglé, une vieille édition du Brave soldat Cveik en version originale, trouvée chez un bouquiniste en République tchèque). Ceux que je n'ai jamais aimés mais qui sont restés. Ceux que je n'ai jamais lus et que je suis surprise de trouver là. Les pas-montrables - le premier qui se moque de mes livres d'astrologie, je lui casse la gueule ! Les doublons et même un triplon. Il y manque ceux que je n'ai plus, prêtés et jamais revus, compensés par ceux que j'ai empruntés et jamais rendus : sont-ils à moi, ceux-là ? Les mets-je sur Babelio ? Après tout, c'est un peu une forme de book-crossing entre amis, non ?Rendre sa bibliothèque personnelle publique, est-ce bien raisonnable ? Si je les montre tous, c'est comme si je disais tout, que va-t-il me rester d'irréductiblement secret ? Alors, j'y vais à petits pas, j'en mets dix par-ci, dix par-là pour me familiariser avec ce nouveau danger. Et je regarde les bibliothèques des autres, avec la légère impression de regarder par le trou de la serrure...
4 commentaires:
Intéressantes réflexions. En ce qui me concerne, je considère que les livres que je peux mettre sur Librarything ne peuvent permettre de ne connaître que mes centres d'intérêts.
Dire quels livres on a aimé, ce n'est pas dire pourquoi et comment on les a aimé, et encore moins dire qui on est. Bref, divulguer ses lectures, c'est donner une clé aux autres, mais cette clé ne permet souvent que d'ouvrir la porte du vestibule, pas les autres. Bien plus, c'est donner une clé à des gens qui se trouvent eux-même dans un immense couloir plein de portes, sans leur indiquer laquelle elle ouvre (ni même si elle en ouvre) ! Il y a peu de chances qu'on puisse saisir la vraie personnalité d'une personne comme ça.
En plus, les serrures ça se change...
Si je comprends bien ce qu'une bibliothèque peut avoir d'intime, je partage l'avis de Rincevent : tu es la seule à en avoir les clés.
Dans le fond, une bibliothèque, c'est un portrait cubiste qui montrerait en une seule fois, superposés, tous les âges de lectures, tous les goûts, les dégoûts, les emballements de jeunesse et les anciennes amours. Dans ces conditions, difficile de reconstruire une histoire dont il manque de surcroît de larges morceaux (qui a conseillé ou offert tel livre, à quel saison ou dans quelle maison celui-ci a-t-il été lu, renvoie-t-il à un drame familial ou une aventure personnelle etc.), difficile de percer le mystère d'un lecteur en quelques tranches de livres...
Merci Rincevent et Guillaume pour ces beaux commentaires.
Cette impression que les livres parlent, me parlent et même parfois parlent pour moi, je l'ai depuis très longtemps. Je suis peut-être en train de retrouver des clés perdues...
Ceci dit, Babelio est un outil formidable, où je continue à mettre tout le contenu de ma bibliothèque - j'en profite pour la réorganiser et tout nettoyer. Il me restera ensuite à taguer, faire des listes, critiquer, noter... et participer à "Masse critique".
Rincevent, dans un premier temps, j'ai testé en parallèle Librarything et Babelio ; j'ai vraiment une préférence pour Babelio, dont les concepteurs planchent actuellement sur des améliorations. A suivre, donc...
J'avoue que je n'utilise Librarything qu'assez peu, donc ça me va pour l'utilisation que j'en fais.
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