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lundi 29 septembre 2008

Danser la francophonie


Le festival des Francophonies en Limousin (du côté de Limoges on dit familièrement "les francos") fête ses 25 ans. Initialement dédié au théâtre, il s'est progressivement ouvert à d'autres arts (musique, danse contemporaine, arts visuels), ce qui lui a permis de rencontrer un public plus large, avide de découvrir année après année les propositions d'artistes venus du monde entier.

Personne ne parle le francophone. Existe-t-il un mode de danser qui relèverait de la francophonie ? Eh bien, peu importe : il s'agit là d'une mauvaise question perfide. L'essentiel, comme le dit fort justement Marie-Agnès Sevestre, directrice du festival, c'est que les artistes "viennent stimuler en nous des endroits délaissés par la vie de tous les jours, comme ces petits muscles qu'on ne fait jamais travailler et qui s'atrophient avec le temps".

Des muscles, donc. Et de l'élégance, de la puissance virile, il y en a dans (H)ombres, ballade chorégraphique exclusivement masculine en deux volets.

Ahmed Khemis, chorégraphe et danseur originaire de Tunis, formé au CNDC d'Angers et fortement marqué par le hip-hop, ouvre le bal avec Voyage des poussières, solo pour un danseur en liberté à la découverte de l'espace ouvert de la scène. Et c'est magnifique.

Un homme qui danse, c'est beau. Six hommes qui dansent ensemble, se cherchent, se fuient, construisent et déconstruisent l'espace avec de drôles de boîtes à roulettes, six danseurs fortement marqués (eux aussi) par le hip-hop, et c'est In vivo, "à l'intérieur du vivant", une chorégraphie décoiffante de Mickaël Le Mer. La compagnie, S'poart (prononcer "espoir"), regroupe des jeunes de La-Roche-sur-Yon qui semblent tout surpris de constater à quel point le public apprécie leur performance et vibre avec eux. On sort de là tout délié, c'est bon ! Mention spéciale pour la musique créée par Julien Camarena (Inusable), qui sert remarquablement ce spectacle. Normal, il est fan d'Aphex Twin, Mum et Sigur Ros.



La compagnie Salia nï Seydou avait déjà rencontré un beau succès lors de l'édition 2006 des francos en présentant Un pas de côté avec des musiciens de l'ensemble Ars Nova. Danseurs et chorégraphes, Salia Sanou et Seydou Boro nous viennent du Burkina Faso avec leurs cinq compagnons danseurs et leurs cinq musiciens. Ils ont fondé et dirigent à Ouagadougou le Centre de Développement chorégraphique "La Termitière" et le festival "Dialogues de corps". Ils nous reviennent avec Poussières de sang, créé pour l'ouverture du festival Montpellier Danse 2008, un spectacle qui évoque avec force la violence extrême exercée sur les corps des esclaves, les gestes qui laissent des traces déshumanisantes, avec en contre-point des mouvements tendus en direction de la verticalité. Et là aussi, le public est totalement conquis.

La danse contemporaine "francophone" ne parle pas, elle est en mouvement. Elle bouge, elle est vivante et ça me va !

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