"- Votre rêve est très aristocratique, insinua l'humanitaire Julius Pollock ; l'avenir sera sans aucun doute plus démocratique. J'aimerais, je vous l'avoue, à voir le peuple plus favorisé.
- Il le sera, mon doux poète, repris-je allègrement, en continuant à développer ma vision future, rien ne manquera au peuple sur ce point ; il pourra se griser de littérature comme d'eau claire, à bon compte, car il aura ses distributeurs littéraires des rues comme il a ses fontaines.
A tous les carrefours des villes, des petits édifices s'élèveront autour desquels pendront, à l'usage des passants studieux, des tuyaux d'audition correspondant à des oeuvres faciles à metre en action par la seule pression sur un bouton indicateur. D'autre part, des sortes d'automatic libraries, mues par le déclenchement opéré par le poids d'un penny jeté dans une ouverture, donneront pour cette faible somme les oeuvres de Dickens, de Dumas père ou de Longfellow, contenues sur de longs rouleaux faits pour être actionnés à domicile.
Je vais même au-delà : l'auteur qui voudra exploiter personnellement ses oeuvres à la façon des trouvères du moyen âge et qui se plaira à les colporter de maison en maison pourra en tirer un bénéfice modéré et toutefois rémunérateur en donnant en location à tous les habitants d'un même immeuble une infinité de tuyaux qui pertiront de son magasin d'audition, sorte d'orgue porté en sautoir pour parvenir par les fenêtres ouvertes aux oreilles des locataires désireux un instant de distraire leur loisir ou d'égayer leur solitude."
Octave Uzanne, La fin des livres (Ed. Manucius, 2008)
les peuples non contactés vous saluent
Il y a 6 heures
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