"Tout ce qui est inscrit fascine notre regard : une veine dans la pierre, le sillon laissé dans une écorce par le grignotement d'un ver, les nervures d'une feuille, le bord éclairé d'une colline.
Avec quelle avidité l'oeil appréhende un signe, un simple contour ou un réseau et avec quelle gourmandise (avec une patience d'insecte) il suit chaque trait, passe d'un point au plus proche, se lève, s'abaisse, tourne à gauche, à droite, revient sur ses pas, hésite, palpe et repart en glissant ! Devant tout aspect arrêté du monde, l'oeil éprouve au plus haut la joie de son propre mouvement, la LECTURE.
Se débarrasser du plus lourd, se confier au plus ténu ; feindre que les objets les plus grands, les plus opaques, les plus pesants soient contenus dans un filet de mailles sans épaisseur, afin de pouvoir les utiliser plus sûrement, les mesurer, les comparer, détacher d'eux cette mince pellicule de lignes que l'on peut déplier ou tordre à sa guise : tel est notre plaisir et notre ruse."
Jean Tardieu, La part de l'ombre (Gallimard, coll. Poésie, 2005)
De « pinchina » à Pinchinat
Il y a 2 jours
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire